Le destin de cette grande dame, qui révolutionna la décoration au XXème siècle, fut aussi singulier que les intérieurs qu’elle redécorait. Son futur mari, Marcellin Castaing, célèbre critique d’art et mécène de l’époque, l’ « enleva » à ses parents avant de l’épouser. Cet esthète raffiné, qui fut la grande passion de sa vie, ouvrit à Madeleine Castaing les portes d’un monde nouveau : celui de l’art contemporain. Aiguillonnée par les nombreux artistes qui entouraient le couple, comme Soutine, Modigliani ou Picasso, Madeleine Castaing développa un goût à la fois très sûr et parfaitement excentrique. Alors même que Paris était occupé, elle eut l’audace d’ouvrir sa propre
boutique d’antiquités et de décoration, dans le quartier de Saint-Germain-des-Prés. Le succès fut fulgurant. Le Tout-Paris s’y bousculait.
En mêlant
les styles et les ambiances, d’une façon très détonante, Madeleine Castaing libéra la décoration du carcan des conventions qui l’enserrait. Dans sa célèbre boutique, elle proposait des meubles en bambou, des tissus bayadères, des bibelots fantaisistes, des papiers peints exotiques et des imprimés léopards. Françoise Sagan, Yves Saint-Laurent et André Malraux comptèrent parmi ses nombreux clients, avec lesquels elle pouvait parfois vivre plusieurs jours durant. C’était le temps nécessaire selon elle pour réussir à traduire leurs émotions en décoration.
Madeleine Castaing a aussi donné son nom à une couleur, le «
bleu Castaing », en accord profond avec son tempérament, intense et lumineux. Cette chaise Ballerine a été vue dans sa salle de bains de sa gentilhommière de Lèves, près de Chartres. Louis Roitel a décidé de la rééditer.
Aujourd’hui encore, les arrangements de la «
diva de la décoration » continuent d’inspirer des intérieurs réputés, comme ceux des salons de thé Ladurée.